Elle venait d’avoir 40 ans. Elle voyait ce passage symbolique comme un point d’équilibre dans la courbe de la vie. S’offrait à elle autant de temps à vivre que de temps vécu. Plus ou moins.
Ce moment charnière, elle ne l’avait pas très bien vécu. Des maux qu’elle croyait derrière elle s’étaient rappelé à son bon souvenir. Et des larmes aussi, beaucoup de larmes. Et une sensation de grand vide. Et nombre d’interrogations. Qu’avait-elle fait de 40 années écoulées ? En avait-elle pleinement profité ? S’était-elle sentie, au moins une fois, réellement et incontestablement vivante ?…
Et qu’allait-elle construire au fil des années à venir ? Allait-elle se lancer à explorer et découvrir de nouveaux horizons (enfin) ? Allait-elle se donner la chance de se vivre à 100% ? Ce grand champ de rien et de tout qui s’offrait à elle lui faisait peur.
La question de la mort, qui très tôt avait fait apparition dans sa vie (avant même qu’elle ne découvre la vie), occupait souvent ses réflexions et appréhensions. Ce n’était pas tant de mourir qui lui posait question, mais plutôt de savoir comment celle-ci allait se dérouler et si elle en aurait conscience ?
Au moment de s’endormir, il y a un court moment où l’on prend conscience que l’on est présent mais que l’on bascule petit à petit dans le sommeil, et après, plus rien jusqu’au réveil. Est-ce que c’était pareil pour la mort ? Est-ce que l’on se sentait partir petit à petit mais que l’on n’avait pas conscience du point de bascule ?
Une fois morte, se souviendrait-elle de sa vie sur terre, de son identité, des gens qu’elle a aimés ? Ou bien aura-t-elle des bribes de souvenirs, comme les restes d’un rêve ?
Sans le savoir, ses lectures s’étaient orientées vers ce qui l’habitait : « Jung. Un voyage vers soi » et « Socrate, Jésus et Bouddha », deux ouvrages de Frédéric Lenoir. Ces lectures lui apportaient réconfort et pistes de réflexion, le soir dans son lit. Avec Cookie à ses côtés sur le lit. Des moments qui lui permettaient de s’ouvrir à plus grand et plus vaste qu’elle-même. Des moments qui lui permettaient de s’apaiser un peu, et lui accordaient une respiration au milieu de ce tumulte émotionnel et existentiel.
Elle avait peur de ne pas chérir assez les moments qui allaient venir. Elle avait peur de passer plus de temps à se demander comment profiter de la vie qu’à profiter de celle-ci ! Elle avait peur d’elle-même. Elle commençait à bien connaître ses modes et schémas de fonctionnement. Elle savait combien elle pouvait donner le pouvoir à ses inquiétudes et à ses doutes.
Ce n’était pas tant ce que la vie allait lui proposer qui l’inquiétait, c’était plutôt de savoir ce qu’elle en ferait. Si elle serait capable de franchir certains obstacles, qui lui barraient la route depuis un bout de temps. Elle ne se faisait pas assez confiance. Et son corps, depuis quelques temps lui envoyaient des signaux.
Elle souhaitait avoir un temps suspendu. Un temps où tout serait au ralenti, lui offrant l’opportunité de se reposer et de réfléchir en profondeur aux « grandes » questions qu’elle se posait. Les réponses, ce sera à elle de les apporter.
Elle souhaitait prendre le temps de faire une pause afin d’être prête, le moment venu, à se vivre et se réaliser pleinement et de n’avoir aucun regret ni remord.
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