Ce matin-là, la jeune femme se réveillait sans comprendre le monde dans lequel elle évoluait. Elle était spectatrice de ce qui se jouait, de ce qui se mettait doucement en place…cela avait pris naissance il y a quelques années déjà…Elle se souvenait avoir participé à la grande manifestation des lycéens, en 2002. Ce qui venait de se produire était inconcevable. Un mouvement de contestation était né, au sein de la jeune génération notamment.
Les années étaient passées…l’indignation et le sentiment de révolte s’étaient amoindris et avaient laissé place à une certaine normalité, élection après élection.
22 ans plus tard, la jeune femme constatait que son pays, et plusieurs autres pays, étaient en train de basculer vers le non amour de l’autre, le rejet de la différence, la peur de ce que l’on ne connaît pas et vers l’uniformisation et les extrêmes.
Pourquoi les gens exprimaient-ils leur mal -être à travers des idées dangereuses ? Pourquoi ne faisaient-ils pas l’effort d’aller à la rencontre de ce qui leur faisait peur, au lieu de le combattre depuis leur fauteuil devant la télévision ?…
Les extrêmes appellent les extrêmes. La stigmatisation appelle l’uniformité.
Comment imaginer un monde sans toutes ses nuances ? Comment aimer un monde où chacun n’aurait pas sa place ? Comment vivre dans un pays où ce qui était impensable il y a un peu plus de 20 ans est devenu la (triste) norme ?
Elle regardait la nature qui s’étendait devant elle…l’éternelle oubliée, l’éternelle saccagée, pillée, exploitée…Une fois encore, la majorité des voix exprimées ne l’avaient pas prise en considération.
A quoi ressemblerait demain, un demain qui se dirigeait vers la désunion et la destruction de la nature ?…
Elle commençait à vraiment douter de ses pairs, elle ne comprenait pas le chemin qu’ils étaient en train d’emprunter car la destination finale ne pouvait qu’être qu’un monde déshumanisé, vide de l’autre, vide de nature. Et à l’inverse, plein d’intolérance, de normalisation et de destruction.
Elle se sentait triste et désœuvrée.
Aussi, elle allait continuer d’être et d’agir comment il lui semblait juste et équitable, à sa mesure à elle. Elle allait continuer à cultiver la différence et la découverte de l’autre, peu importe d’où il venait. Non, elle n’allait pas fermer ses volets ni sa porte d’entrée pour se calfeutrer dans sa maison et passer à côté de la variété et de la richesse des liens humains.
Et chaque jour, comme à son habitude, elle prendra le temps d’admirer la Terre qui l’accueillait elle et toutes les merveilleuses espèces encore vivantes. Imprimer de manière permanente sur ses rétines ce qui, dans quelques années vraisemblablement, ne sera plus, ou sera très certainement moins belle, moins variée et moins riche. A l’image de l’humanité qui n’en aura pas pris soin et qui aura préféré combattre son prochain plutôt que de l’accueillir.
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