Nous venons tous au monde avec un héritage. Nous héritons de l’histoire et des mémoires familiales. Certaines blessures ou peurs peuvent se répercuter de générations en générations. La psychogénéalogie traite de cela : de l’héritage familial.
Comme tout le monde, je suis venue au monde avec un bagage émotionnel : le mien mêlé à l’histoire familiale. Certains évènements familiaux sont venus définir certains de mes choix, ou non choix, certaines de mes peurs, certains de mes comportements. Nous ne naissons pas aussi libres que nous le pensons.
Pour ma part, je ne me suis jamais sentie libre par rapport au souhait ou à l’envie d’avoir un enfant. Le décès de ma sœur alors que ma maman m’attendait est venue m’impacter de manière brutale, implacable. Jusqu’à peu, j’avais beaucoup de mal à être en présence d’une femme enceinte. Cela venait réveiller en moi un sentiment de mal être profond, de peur intrinsèque, d’angoisse et aussi d’envie…tout cela à la fois ! Quelque part, j’enviais ces femmes qui franchissaient le cap alors que moi je m’en sentais incapable. Pour elles, me disais-je, le choix de vouloir un enfant était plus simple que pour moi. Je me sentais, et me sens encore, prisonnière du choc que j’ai vécu dans le ventre de ma maman et des conséquences que cela a eu sur moi : beaucoup d’inquiétudes, un sentiment d’insécurité, une peur irraisonnée de la perte et de la mort de mes proches.
Aujourd’hui encore je ne peux pas franchir le cap de porter la vie en moi. C’est trop. Trop de tout.
Longtemps j’ai porté en moi la culpabilité de ne pas être comme certaines de ces autres femmes qui voulaient ou veulent être maman. Etre enceinte est synonyme de danger et de perte pour moi.
J’ai beaucoup travaillé pour aujourd’hui accepter cette peur sans me juger. Si j’écris sur le sujet aujourd’hui, c’est que tout n’est pas encore guéri et que parfois encore, j’ai le sentiment que la vie, que le destin familial ont choisi pour moi.
Héritage. Lignée. Karma. Traumatisme. Transmission. Destin.
La maman de mon papa est décédée en donnant naissance au petit dernier de la fratrie. La cousine de la maman de mon papa est morte en donnant la vie, elle aussi. Ces évènements viennent marquer l’histoire familiale et influer sur la vie des générations suivantes.
Je n’ai pas vraiment parlé avant l’âge de 4 ans, et ma maman se souvient de moi comme une petite fille qui pleurait très peu, qui ne réclamait jamais. Pendant longtemps je n’osais pas exprimer mes vrais ressentis, dire ce qui m’avait blessée, ce qu’il y avait à l’intérieur de moi. Pour ne pas déranger. Pour ne pas blesser. Pour donner le change.
Aujourd’hui, j’ai avancé sur ces points : j’ose de plus en plus exprimer ce qu’il y a à l’intérieur de moi, sans venir y coller une image de façade qui conviendra au plus grand monde. J’ose de plus en plus être vraie. Pas pour les autres, mais pour moi. Petit à petit, j’ai cheminé, j’ai appris à moins me mettre en retrait. Petit à petit je me donne la légitimité d’être celle que je suis. En essayant de moins culpabiliser de ne pas toujours être celle qu’on attend que je sois.
A bientôt 40 ans, j’apprends à oser dire non, à oser dire quand quelque chose ne va pas. C’est un exercice encore difficile parfois. Par peur d’être rejetée. Par peur de blesser l’autre. Pas peur qu’on ne me reconnaisse pas.
Trouver sa place dans ce monde n’est pas chose aisée. Trouver sa place au sein de sa famille n’est pas inné. Bien souvent, on a la place que les autres nous donne. Et pourtant, il nous revient, à force d’amour pour soi-même, de trouver notre place bien à nous sans avoir à cacher ou masquer qui nous sommes. Et les autres ne sauront que plus nous en aimer et nous faire de la place dans leurs vies.
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